Publié le 23/06/2021 par la Rédaction
« Et toi après le Bac, tu veux faire quoi ? Tu veux devenir ingénieur(e) ? ». Voilà ce que j’ai lu sur la plaquette d’une école au nom saugrenu, un beau matin de janvier. Après des heures de dérive sur Internet, espérant trouver LA formation qui provoquerait LE déclic - à savoir : trouver ma voie, ce que je pourrai bien fiche de ma vie une fois mon Bac en poche - allez savoir comment, j’ai fini par débouler sur une école « d’agroécologie ». Encore une école, me dis-je, qui se donne un beau titre à coup de « bachelors », « brand content », « community management », « agroschool » et autres mots incompréhensibles, mixés en anglais pour donner un air cool et dissimuler le vide professionnel accroché au diplôme. Constatant la faible longueur de ma liste de vœux Parcoursup, c’est finalement sans grande motivation que j’envoyai un mail à l’adresse indiquée, pour participer à ce qui était nommé avec enthousiasme : « Vis ma vie d’élève-ingénieur.e ! ». « Elève-ingénieur.e » ! Quel beau nom pour une espèce ne vivant que de stress et de cuites… Mais soit, ne jugeons pas trop vite.
C’est donc armée de ma plus grande nonchalance, que je me présentais à ladite école le mercredi suivant, souhaitant mais sans grand espoir, y trouver une vocation.
Après une rapide intervention en amphi, durant laquelle un petit monsieur grisonnant nous a parlé financements, direction les laboratoires pour réaliser des « ateliers ». Nous commencions par les laboratoires de biologie ! Sûrement un cours où l’on parle pistils, étamines et corolle, fastoche ! La professeure est arrivée et nous a fait visiter le laboratoire. Devant une affiche aux tracés biscornus, tellement immense qu’il fallait quatre feuilles A4 pour parfaire le tracé, elle nous expliqua d’un air très sérieux que c’était « une carte métabomachin », qu’il fallait savoir par cœur. Complètement tarés ces ingénieurs ! Il y avait au moins 150 noms à rallonge et autant de flèches les reliant entre eux ! Et c’est avec des étoiles dans les yeux, qu’elle nous a finalement pointé du doigt un nom imbuvable : « Acétyl-coenzyme A » en nous disant toute fière « c’est ma molécule préférée ». Je commençais alors à me demander s’ils avaient vraiment toutes les planches à la palissade dans cette école…
Et ce n’était que le début ! En allant vers les laboratoires de microbiologie, un concert de « Atchoum ! », s’est fait entendre dans le couloir. En passant devant la salle, nous avons aperçu une quarantaine d’élèves, les yeux rougis et le nez coulant avec des fleurs dans la main. Complètement bizarre ! Et le pire, c’est qu’ils avaient l’air ravis de leur sort ! Dans le laboratoire de microbiologie, nous avons été accueillis par un autre petit monsieur grisonnant, à la différence que celui-ci portait un bandana autour du cou. Original comme pratique. Il avait l’air complètement passionné par ses petites boites colorées et tachetées. Et là, je me suis dit : « Vraiment, si quelqu’un te regarde comme il regarde ses microorganismes, t’as tout gagné ! ». Il en parlait avec une toute petite voix pleine d’émotion, tellement petite, que l’on entendait distinctement tout ce qui se disait dans le laboratoire d’en face. « On coupe au niveau du scrotum et là, vous avez un beau testicule prêt à cuire ! » disait une grosse voix. Décidément, elle est vraiment pittoresque cette école ! Quel ne fut pas mon effarement quand, passant devant cette salle, je vis au milieu d’un groupe d’élèves, deux étudiantes au bord de l’évanouissement et un étudiant en train de tirer avec difficulté sur un tube flasque, pendant que le prof clamait : « Sors-la du fourreau ! ». Non mais vraiment, ils sont fous ces Isariens !
Fanny Vincent